Le Groupe de Recherche « Marie-Joseph Le Guillou : un théologien pour notre temps »
Une expérience fructueuse de travail en commun.
Du 24 au 27 novembre 2010, à l’invitation de Mère Marie-Agnès, Bénédictine du Sacré-Cœur de Montmartre et Présidente de l’Association P. Marie-Joseph Le Guillou op, j’ai eu l’occasion de visiter pour la première fois les archives personnelles du théologien dominicain, conservées intactes par l’Association depuis son décès au couvent de Béthanie (Blaru), le 25 janvier 1990. La collection se composait d’une abondance de documents manuscrits, dactylographiés et documentaires qui, chronologiquement, s’étendaient de ses années de formation au Saulchoir aux transcriptions des homélies à Béthanie pendant les dernières années de sa vie. Une vie consacrée au service de l’Église en tant que théologien – travail œcuménique, service en tant qu’expert au Concile Vatican II, participation à la Commission théologique internationale, enseignement et travail académique à l’Institut supérieur d’études œcuméniques de l’Institut Catholique de Paris… – attendait d’être « cataloguée » et étudiée. La découverte d’un « tel trésor » a donné lieu à l’élaboration d’un projet de catalogage de la collection et de la bibliothèque, qui a été reconnu comme cours de licence et de doctorat de la Faculté de Théologie de notre Université et généreusement parrainé par l’Association Marie-Joseph Le Guillou op. Les inventaires du Fonds et de la Bibliothèque ont constitué les premières publications du projet.
Depuis juin 2013, la Faculté de Théologie propose chaque année un cours d’été résidentiel dans les archives du Père Le Guillou. Les cours proposent une initiation à la recherche et un séminaire monographique sur l’un des principaux travaux ou l’un des arguments fondamentaux de la production du théologien dominicain. De plus, ces cours favorisent la préparation de thèses de maîtrise et de doctorat. Je tiens à souligner que les cours résidentiels (fruit de la collaboration entre l’Association P. Marie-Joseph Le Guillou et notre Faculté) permettent aux participants de partager la vie du Prieuré de Béthanie des Sœurs Bénédictines du Sacré-Coeur de Montmartre. Sans l’accueil chaleureux et exquis des Bénédictines, signe d’une profonde communion ecclésiale, l’expérience de travail en commun n’aurait pu être si fructueuse.
Recherche et étude en commun, travail communautaire à la suite d’un grand maître : tout cela devait évidemment conduire à une activité éditoriale. Ainsi, à l’occasion du cinquantième anniversaire de l’ouverture du Concile Vatican II, une nouvelle édition du Visage du Ressuscité (Parole et Silence, Paris 2012) – une publication qui comprend une révision complète du texte et de l’appareil critique – et ses traductions en espagnol (El Rostro del Resucitado. Grandeza profética, espiritual y doctrinal, pastoral y misionera del Concilio Vaticano II, Encuentro, Madrid 2012) et en italien (Il Volto del Risorto. Grandezza profetica, spirituale e dottrinale, pastorale e missionaria del Concilio Vaticano II, Cantagalli, Sienne 2015). La même année, l’Association a promu à Paris la célébration d’un congrès international Cinquante ans après Vatican II, dont les actes ont été publiés en français (À la lumière de Vatican II. Relectures du « Visage du Ressuscité » du P. Marie-Joseph Le Guillou, Parole et Silence, Paris 2014) et en espagnol (A la luz del Resucitado. Una lectura cristológica del Vaticano II, Collectanea Matritensia 11; Series Le Guillou 3; Universidad San Dámaso, Madrid 2014).
Ces dernières années, du point de vue des traductions en espagnol, et grâce à la disponibilité d’Ediciones Encuentro et de Biblioteca de Autores Cristianos, les volumes suivants ont vu le jour : Tu palabra es la luz. Meditaciones y homilías dominicales del Ciclo A (BAC, Madrid 2016); Tu palabra es el amor. Meditaciones y homilías dominicales del Ciclo C (BAC, Madrid 2015); Tu palabra es la verdad. Meditaciones y homilías dominicales del Ciclo B (BAC, Madrid 2014); ¡Cristiano en el mundo! ¿Es posible en nuestro tiempo? (BAC, Madrid 2014); La Iglesia, luz en nuestra noche (Encuentro, Madrid 2014); Los testigos están entre nosotros. La experiencia de Dios en el Espíritu Santo (Encuentro, Madrid 2013).
Il convient également de mentionner la Journée d’étude organisée par le Département de théologie dogmatique de la Faculté de théologie de notre Université, Confesar el misterio del Padre. En el XXV aniversario del fallecimiento de Marie-Joseph Le Guillou, qui a eu lieu le 20 janvier 2015, et dont les actes ont été publiés dans le volume Confesar el misterio del Padre. En el XXV aniversario del fallecimiento de Marie-Joseph Le Guillou op (Collectanea Matritensia 12; Series Le Guillou 4; Universidad San Dámaso, Madrid 2015).
La dernière étape a été la constitution du Groupe de recherche Marie-Joseph Le Guillou : un théologien pour notre temps et la présentation d’un premier projet de recherche de trois ans et son acceptation par le Bureau de la Recherche et des Relations Internationales de l’Université Ecclésiastique San Dámaso. Le groupe de recherche – dirigé par le professeur G. Richi Alberti et coordonné par le professeur J. López Peñalba (secrétaire scientifique), qui a récemment publié une précieuse monographie sur l’expérience de l’Esprit Saint dans la théologie de Le Guillou intitulée El arte del Espíritu (San Dámaso, Madrid 2017) – compte sur la collaboration de quelques professeurs, étudiants et diplômés de notre Université ainsi que sur le travail de quelques professeurs du monde théologique français et italien.
Dans le cadre des travaux du Groupe de Recherche, le Département des Publications de l’Université a réuni les différentes publications déjà produites et celles qui verront le jour dans la Series Le Guillou, qui a maintenant atteint son huitième volume. En plus de ceux déjà mentionnés, la Series comprend les volumes suivants : J. G. Morales Arráez, « Le Cahier du Synode » de Marie-Joseph Le Guillou (San Dámaso, Madrid 2016) ; J. Argüello Sánchez, Marie-Joseph Le Guillou : Textos sobre el Corazón de Cristo (San Dámaso, Madrid 2016) et G. Richi Alberti, Marie-Joseph Le Guillou. Retraite 2-11 septembre 1957 (San Dámaso, Madrid 2017).
La question de savoir s’il vaut vraiment la peine de consacrer autant d’énergie et de travail à l’œuvre de Marie-Joseph Le Guillou s’impose. Une connaissance minimale de son parcours personnel serait suffisante pour répondre par l’affirmative à cette question. Mais peut-être faut-il souligner que le parcours vital et théologique du Père Le Guillou – qui commence comme professeur de morale, se spécialise dans le domaine œcuménique, participe à Vatican II en tant qu’expert, et se concentre dans ses dernières années sur « l’essentiel » du mystère chrétien – nous indique qu’il n’est possible, ni pour l’Église ni pour l’élaboration théologique, de renoncer à la rencontre et au dialogue des questions, demandes, préoccupations, incertitudes et attentes de l’homme contemporain, celles qui habitent le cœur de tous les chrétiens. Certes, aujourd’hui, du moins en Europe, la présence utopique des idéologies n’est pas comparable – du moins en tant que système totalitaire – à ce qui s’est passé il y a seulement quarante ans – nous ne sommes pas, en fait, si loin de 1973, date de publication du Mystère du Père, l’œuvre la plus connue de Le Guillou – et pourtant notre temps ne peut être bien compris si nous ne prenons pas en compte le parcours que la culture occidentale a suivi pendant des décennies. À l’obscurcissement du visage du Père, et après le délire utopique de Prométhée, nous assistons maintenant à une auto-affirmation impuissante de Narcisse. Nous participons à cette culture, nous vivons dans ce monde et en lui nous sommes appelés à confesser le nom du Père. Et pour cela, le Père Le Guillou est, sans aucun doute, d’une grande aide.
On peut dire franchement que, grâce au travail réalisé dans notre Faculté de 2011 à 2019, la figure et la pensée de Marie-Joseph Le Guillou ont été présentes dans le panorama théologique espagnol. Sa figure constitue dans le présent un guide sûr pour l’élaboration théologique. Quiconque s’approche de ses œuvres pourra y percevoir la finesse spéculative et spirituelle d’un théologien passionné par la contemplation du Mystère, qui aime Jésus Christ et qui aime l’Église.
Prof. Dr. Mgr. Gabriel Richi Alberti
Doyen de la Faculté de Théologie
Université Ecclésiastique San Dámaso (Madrid)